Le paradoxe de la jeune entreprise

Cela faisait bien longtemps que nous n’avions traité d’un paradoxe.

Un état de manque commençait à s’installer, il nous fallait y remédier urgemment !

Pour rappel le dictionnaire définit ainsi le paradoxe : « Opinion, chose qui va contre la manière de penser habituelle, qui heurte la raison ou la logique » (Dictionnaire du français contemporain, Larousse 1971 !).

Les paradoxes ne manquent pas. Nous avons même le sentiment qu’ils se multiplient et dans beaucoup de domaines. Cependant, ils ont une certaine faculté au camouflage. Il faut donc d’abord les débusquer pour ensuite les étudier.

Histoire de compliquer un peu la tâche, pour que ce blog soit cohérent tant sur le fond que la forme, il faut que le paradoxe concerne les entreprises ou les affaires d’une manière générale.

Le déclic a eu lieu en travaillant pour un client qui démarre une activité.

Age de l’entreprise, qualité, prix, volume des ventes

Une observation établie sur deux dizaines d’années de pratique professionnelle met en évidence une étrange relation entre l’âge de l’entreprise, la qualité qu’elle délivre, les prix qu’elle pratique et le volume de ses ventes.

Reprenons ces éléments séparément avant de les recombiner.

Age de l’entreprise et volume des ventes

On partira du principe que l’entreprise survive aux fatidiques 2-3 ans qui suivent son lancement.

Il est normal que les volumes des ventes augmentent dans le temps.

Ils sont faibles au démarrage, le temps de se faire connaître et reconnaitre, de se faire identifier pour le produit ou service que l’on propose.

Age de l’entreprise et qualité de ses prestations

Au démarrage, tout le monde est sur le pont, le sabre entre les dents, prêt à en découdre.

Quelle jeune entreprise ne désire pas si non bouleverser les standards de son métier au moins faire mieux que les « vieux » déjà installés, les challenger à commencer par la qualité proposée.

Sur une base 100, la jeune entreprise se place à 110 au moins.

Chemin faisant, l’expérience montre que la sur-qualité n’est pas vraiment nécessaire. Soit elle n’est pas perçue, soit elle n’est pas utile, en tout état de cause, elle coûte cher. On revient alors à des standards plus raisonnables, plus rentables, bref, on vieillit !

 

Age de l’entreprise et prix de ses prestations

Dans la lignée de la qualité, la jeune entreprise fracasse souvent les prix.

Le sabre dans les dents, on a dit ! C’est une grande offensive !

Cette politique tarifaire s’explique de différentes manières qui peuvent être combinatoires :

  • Envie de se démarquer des concurrents déjà en place. La fameuse « guerre des prix ».
  • Méconnaissance de ses coûts réels d’exploitation
  • Méconnaissance de la valeur de son travail.

Et puis, comme pour la qualité, la prise de conscience se fait progressivement et l’on s’aligne peu ou prou sur les anciens.

L’apothéose du paradoxe

Finalement c’est le comportement du client qui est paradoxal !

D’abord, aujourd’hui, le « jeunisme » est à la mode. Exit le séniors (entendre à partir de la quarantaine…) sauf dans un bel élan de discours télévisuel ou quelque autre mesure dite sociale. C’est certainement Evian qui bat tout le monde à plate couture en transformant ses consommateurs forcément dynamiques et beaux en vaillants en nourrissons débordants de vitalité et de dextérité. A moins de descendre au niveau du spermatozoïde ou de l’ovule, ça va être dur de faire mieux…

ET POURTANT… Le client préfère que l’entreprise ait une certaine maturité, un certain âge, bref qu’elle ne soit pas si jeune que ça !

Ensuite, n’importe quel client recherche avant tout la meilleure qualité.

ET POURTANT… Il se prive d’un certain « goodwill » qualitatif en choisissant volontairement de ne pas acheter au démarrage, lorsque toute l’équipe du fournisseur est à fond !

Enfin, le prix. C’est le tout premier point de vigilance de n’importe quel acheteur, même le moins apte à la fonction !

ET POURTANT… Au lieu de bénéficier de prix ras du plancher d’une jeune entreprise, il préfère payer plus cher, quand elle est mieux installée. C’est le sur-prix qu’il accorde à une relative assurance d’une certaine tranquillité.

L’apothéose du paradoxe est que le client, au lieu d’acheter à une jeune entreprise la meilleure qualité à un prix quasi imbattable et plus vite que les autres attend patiemment que son fournisseur murisse. Il achète alors tardivement et dans les moins bonnes conditions possibles !

ET POURTANT il est persuadé de faire un excellent choix !

Arnaud BISIG

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